mercredi 3 décembre 2025

Bénin : le regard inédit des JSEB 2025 sur les failles et les potentiels du continent africain

Le professeur James Robinson, lauréat du prix Nobel d’économie 2024, et l’économiste Adama Diaw ont proposé deux analyses complémentaires sur l’histoire, la politique et l’économie de l’Afrique subsaharienne. Entre héritages précoloniaux, fragilités institutionnelles, vulnérabilités contemporaines et potentiels encore inexploités, leurs interventions ont porté sur les ressorts profonds du développement du continent lors de l’édition 2025 des Journées scientifiques de l’économie béninoise (JSEB 2025).

La présentation de James Robinson a constitué l’un des moments phares de l’événement. Il a révisé l’histoire politique et économique africaine afin d’expliquer la singularité du continent dans le cadre de la grande divergence économique mondiale observée depuis vingt ans.

Contrairement aux théories qui imputent les difficultés actuelles à une déficience structurelle, le professeur a rappelé qu’avant la colonisation, l’Afrique comprenait des milliers de communautés autonomes. Cette fragmentation ne traduisait pas une faiblesse, mais reflétait une logique sociale sophistiquée, centrée sur les relations humaines.

Il a aussi développé le concept de « wealth in people », une forme de richesse fondée non sur l’accumulation matérielle mais sur la capacité à attirer, fédérer et fidéliser les individus. Dans de nombreuses sociétés africaines, la valeur d’un individu, d’un clan ou d’un lignage dépendait de sa force relationnelle.

Cette organisation a produit une grande cohésion communautaire et une méfiance vis-à-vis de la centralisation du pouvoir. Même les royaumes relativement centralisés, comme le Dahomey ou les Zoulous, combinaient pouvoir politique et organisation lignagère. Selon James Robinson, l’Afrique se distingue également par une ouverture exceptionnelle envers les étrangers, perçus comme une ressource sociale et non comme une menace.

Les institutions économiques et religieuses reflétaient cette philosophie, car l’économie ne reposait pas sur l’accumulation capitalistique et la religion, tournée vers les ancêtres, ne poursuivait ni expansion ni conversion. Toutefois, ces structures locales ont exposé les sociétés à une plus grande vulnérabilité face à la traite, à la colonisation et à l’imposition de l’État moderne.

Pour sa part, Adama Diaw s’est concentré sur les performances économiques contemporaines de l’Afrique subsaharienne. Il a rappelé que les écarts entre pays ne s’expliquent ni par les ressources, ni par la géographie, ni par le commerce. Selon lui, la qualité des institutions politiques constitue le facteur clé, car elle oriente et filtre les politiques publiques.

Il a souligné l’effet délétère de l’instabilité politique et de la corruption sur l’investissement, la croissance et la confiance des citoyens. Les pays ayant renforcé leurs institutions en matière de démocratie, de stabilité et de transparence ont enregistré une croissance supérieure, davantage d’investissements étrangers et une meilleure maîtrise de l’inflation.

Pour le professeur Diaw, la prospérité africaine repose avant tout sur la consolidation institutionnelle, condition indispensable à la réalisation des Objectifs de développement durable et de la Vision africaine 2063.

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