Le 7 décembre 2025, le Bénin a été plongé pendant quelques heures dans une séquence de tension extrême avec des mouvements armés autour de la présidence, l’interruption de la télévision nationale et la proclamation improvisée d’un prétendu comité militaire. Mais avant même que le scénario ne se déploie, l’État béninois et ses alliés régionaux avaient déjà repris l’initiative. L’échec rapide du putsch n’est pas un hasard. Il résulte d’une combinaison de facteurs politiques, militaires et régionaux qui redessinent les équilibres de sécurité en Afrique de l’Ouest.
Une armée qui a choisi sa boussole : la République, pas le pouvoir
Les putschistes n’ont jamais pu prétendre représenter la majorité des forces armées. Dès les premières heures :
• l’état-major béninois est resté aligné sur les autorités légales,
• les unités clés ont refusé de suivre les mutins,
• et les positions stratégiques ont été reprises en quelques heures.
Cette réaction rapide s’explique par une transformation profonde du secteur militaire béninois qui connaît, une professionnalisation, une formation internationale et une culture institutionnelle séparée du jeu partisan. Contrairement à d’autres pays de la région, les officiers béninois ne se considèrent plus comme une alternative politique un changement décisif dans un contexte régional marqué par la vague de coups d’État.
Une société qui rejette l’aventure putschiste
Si la tentative a échoué, c’est aussi parce que les mutins n’ont trouvé aucun relais social. Ni dans les villes, ni dans les cercles religieux, ni dans les milieux intellectuels.
La population est restée spectatrice mais déterminée. Pas de manifestations de soutien, pas de mobilisation opportuniste, pas de dynamique de contagion.
Le souvenir fondateur de la Conférence nationale de 1990, les alternances politiques successives et l’expérience du pluralisme ont façonné une culture politique où la rupture militaire apparaît non seulement illégitime, mais dangereuse. Sans base populaire, les putschistes étaient condamnés dès leur apparition.
L’intervention décisive du Nigéria et de la CEDEAO
Le véritable tournant est venu de l’extérieur. À la demande du gouvernement béninois, le Nigéria puissance militaire dominante de la région a déclenché une opération coordonnée :
• frappes aériennes ciblées contre les colonnes en fuite ;
• contrôle aérien renforcé pour empêcher toute réorganisation ;
• déploiement de troupes pour sécuriser les institutions et appuyer l’armée béninoise.
Cette intervention éclair, saluée par le président Bola Tinubu, marque l’un des exemples les plus nets de réaction régionale directe contre une tentative de putsch.
En parallèle, la CEDEAO a activé sa force en attente et a offert une couverture politique et opérationnelle au gouvernement béninois. Le message envoyé est sans ambiguïté. Désormais, la sous-région ne tolérera plus la prise de pouvoir militaire.
Une victoire symbolique dans une région sous tension
Le Bénin peut se targuer d’un succès rare : une armée restée républicaine, une population qui refuse la rupture et des partenaires régionaux prêts à intervenir.
Mais cette réussite s’inscrit dans un environnement profondément instable :
• Au Mali, au Burkina Faso et au Niger, les régimes militaires de l’AES promeuvent une vision alternative du pouvoir fondée sur la souveraineté armée.
• Les réseaux pro-juntes, influenceurs et activistes transnationaux ont immédiatement relayé le narratif des mutins béninois dès les premières heures des tensions.
• La coopération sécuritaire régionale est affaiblie par le retrait de ces États de la CEDEAO et par la compétition stratégique croissante entre pays côtiers et pays sahéliens.
Un test réussi, mais loin d’être le dernier
L’échec du putsch béninois confirme que les États côtiers qui misent sur :
• une armée disciplinée,
• une société civile active,
• et des alliances régionales solides,
peuvent encore contenir la dynamique putschiste qui s’est installée au Sahel depuis 2020.
Mais il rappelle également que la pression ne disparaîtra pas. Entre la porosité des frontières, la radicalisation géopolitique de l’AES et la guerre informationnelle menée depuis plusieurs années, le Bénin devient l’un des pivots de la résilience démocratique dans la région.
Sa capacité à consolider ce modèle déterminera en grande partie la forme que prendra la sécurité ouest-africaine dans les prochaines années.
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