La Chine ne se limite plus à son rôle d’atelier du monde. D’après une étude d’AidData, un laboratoire de recherche de l’université américaine William & Mary, elle occupe désormais la première place des créanciers mondiaux, devant les institutions multilatérales et les marchés financiers occidentaux.
Depuis 2000, les banques publiques chinoises ont octroyé 2 200 milliards de dollars en prêts et en subventions. Ces financements touchent non seulement les pays en développement, mais aussi les économies avancées ainsi que leurs infrastructures stratégiques.
Des prêts tournés vers les pays riches
Entre 2000 et 2023, 943 milliards de dollars ont été prêtés à des pays à revenu élevé, soit près de la moitié du portefeuille global. Les projets phares des « Nouvelles Routes de la Soie » ne représentent qu’environ 20 % du volume total.
Cette réorientation s’est accentuée après 2015 avec la stratégie « Made in China 2025 », qui vise l’autonomie de Pékin dans les secteurs critiques que sont : les technologies sensibles, les infrastructures stratégiques, les énergies et minerais essentiels.
Les États-Unis apparaissent comme le premier bénéficiaire mondial, avec 200 milliards de dollars reçus sous forme de prêts. Ces financements soutiennent des entreprises telles qu’Amazon, Tesla, Ford ou Boeing, des projets de gaz naturel liquéfié au Texas et en Louisiane, ainsi que divers centres de données et infrastructures urbaines.
Même Walt Disney a bénéficié d’un prêt de 107 millions de dollars via l’ICBC en 2020. Une dépendance paradoxale pour le pays qui met en garde depuis des années contre la « diplomatie du piège de la dette ».
L’Europe, deuxième zone d’influence
En Europe, 161 milliards de dollars ont été identifiés à travers 1 800 projets. Le Royaume-Uni est le premier bénéficiaire, avec 60 milliards de dollars, dont une partie a facilité l’accès de groupes chinois à des technologies sensibles comme les semi-conducteurs. La France suit avec 21,3 milliards de dollars accordés via 184 projets, touchant l’énergie, l’industrie, les transports et infrastructures. Le Portugal a reçu 11,6 milliards d’euros, en grande partie pour soutenir EDP et renforcer son système électrique national.
Une logique économique et géopolitique claire
Derrière ces financements se dessine une stratégie cohérente. Pékin utilise ses prêts pour obtenir un levier économique, un accès privilégié aux entreprises de haute technologie, une présence accrue dans les infrastructures stratégiques et une influence géopolitique subtile mais décisive. Comme le résume AidData, la Chine est désormais « un créancier qu’aucun pays ne peut se permettre de contrarier ».
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