dimanche 4 mai 2025

Faure encore plus fort : une réforme pour l’éternité ?

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Lomé. Dans un tour de passe-passe institutionnel dont seul le Togo semble avoir le secret, Faure Gnassingbé vient de réussir ce que peu de chefs d’État auraient osé imaginer : conserver le pouvoir en le déplaçant. Grâce à une réforme constitutionnelle controversée, l’actuel président devient président du Conseil des ministres, concentrant entre ses mains tous les pouvoirs, pendant que la présidence de la République est confiée à un vétéran de la politique, Jean-Lucien Savi de Tovè, 86 ans, désormais chef d’État… sans attributions.

Une “transition parlementaire” au goût de déjà-vu

Présentée par les autorités comme une avancée démocratique, la réforme adoptée en avril consacre le passage du Togo à un régime parlementaire. Dans les faits, le président de la République n’est plus l’homme fort du pays. Ce rôle revient désormais au président du Conseil des ministres, élu par les députés, et investi de pouvoirs élargis : orientation de la politique nationale, nomination aux postes clés, autorité sur les forces de défense et de sécurité…

Et devinez qui est élu à ce poste ? Faure Gnassingbé, bien sûr.

Jean-Lucien Savi de Tovè : un président protocolaire

Pendant ce temps, Jean-Lucien Savi de Tovè, ancien président de la Cour constitutionnelle et figure respectée du sérail togolais, est désigné président de la République par les députés. Un rôle essentiellement symbolique. À 86 ans, il est chargé d’incarner l’unité nationale et de représenter l’État à l’international… mais sans pouvoir réel ni influence politique. Il est en quelque sorte un chef de l’État honorifique, pendant que Faure tient le gouvernail.

LIRE AUSSI : Togo : Jean-Lucien Savi de Tové, le vétéran du dialogue devient président à 86 ans

Le génie du verrouillage institutionnel

Avec cette réforme, Faure Gnassingbé (au pouvoir depuis 2005) montre qu’il n’est pas seulement un héritier politique, mais aussi un stratège redoutable en matière de conservation du pouvoir. Ce changement de régime lui permet de rester au sommet, tout en contournant les critiques liées à la longévité présidentielle. Il ne brigue plus la présidence, il devient le “Premier Togolais”, sans limitation claire dans le temps.

Pour certains analystes, cette réforme équivaut à un couronnement déguisé : Faure ne quitte pas le pouvoir, il le réinvente à son avantage.

Un Parlement complice, un peuple silencieux

Le texte constitutionnel a été adopté à la hussarde, sans référendum. Les députés de l’Union pour la République (UNIR), majoritaires à l’Assemblée, ont voté sans grande contestation. L’opposition, marginalisée depuis des années, dénonce une mascarade institutionnelle. Mais dans les rues de Lomé, le silence prédomine, entre résignation, peur et fatigue politique.

Et maintenant ?

Faure Gnassingbé n’a pas annoncé son retrait de la vie politique. Au contraire, il s’installe dans un nouveau fauteuil exécutif, dont la légitimité repose désormais sur un Parlement largement acquis à sa cause. Il est donc probable qu’il se maintienne aux commandes du pays au-delà de 2025, dans ce nouveau costume de président du Conseil, pendant que la fonction présidentielle devient, au Togo, une simple formalité constitutionnelle.

La réforme a transformé la façade du pouvoir, mais le fond reste inchangé : un régime dominé par un seul homme, au pouvoir depuis bientôt vingt ans, et qui ne semble pas prêt de passer la main.

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