Alors que le Sénégal emboîte le pas et que le Gabon annonce vouloir suivre, le Bénin apparaît comme un pionnier d’une réforme démocratique audacieuse visant à assainir l’espace politique. À l’opposé des dérives autoritaires des régimes putschistes du Sahel.
La prolifération incontrôlée des partis politiques est un mal bien connu dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre. Dans nombre de capitales africaines, la scène politique ressemble à une foire où coexistent des centaines de partis sans ancrage territorial, sans vision idéologique claire, ni existence réelle en dehors des périodes électorales. Face à cette cacophonie, le Bénin a montré la voie en engageant dès 2018 une réforme ambitieuse et structurante de son système partisan.
Le Bénin, laboratoire d’un assainissement politique
Le pays, autrefois qualifié d’« intello-démocratie » pour son foisonnement politique post-Conférence nationale, comptait plus de 250 partis enregistrés. Cette inflation, loin d’être synonyme de vitalité démocratique, engendrait instabilité, clientélisme et marchandages électoraux à répétition.
Sous l’impulsion du président Patrice Talon, le Bénin a adopté une nouvelle Charte des partis politiques et un code électoral plus exigeant, imposant notamment des critères de représentativité nationale, une traçabilité des financements et une structuration formelle.
Résultat : seuls quelques partis majeurs comme l’Union Progressiste le Renouveau (UPR), le Bloc Républicain (BR) ou les Démocrates dominent désormais l’espace électoral, offrant une plus grande lisibilité aux citoyens et favorisant des coalitions stables au Parlement.
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Le Sénégal emboîte le pas
Inspiré par ce modèle, le Sénégal a annoncé début 2025 une initiative similaire, visant à rationaliser ses quelque 300 partis politiques. Le ministre de l’Intérieur a confirmé qu’un projet de loi est en préparation, destiné à introduire des conditions de représentativité plus strictes et à lutter contre les partis de façade.
Ce tournant intervient dans un contexte post-électoral tendu, où la question de la gouvernance politique et de la légitimité des forces partisanes devient cruciale. L’objectif affiché est clair : préserver le pluralisme tout en mettant fin au désordre partisan.
Le Gabon en réflexion, une annonce présidentielle récente
Le 7 mai 2025, le président gabonais Brice Clotaire Oligui Nguema a, à son tour, exprimé sa volonté de réformer le paysage politique national conformément aux recommandations du dialogue national d’avril 2024.
Lors d’un échange avec politiques, il a dénoncé “l’existence de partis politiques sans base, créés uniquement pour négocier des postes”. Une commission ad hoc devrait être constituée dans les semaines à venir pour proposer un cadre législatif similaire à celui du Bénin.
Une dynamique à distinguer des dérives autoritaires au Sahel
Mais cette tendance à la régulation politique ne doit pas être confondue avec les manœuvres de musellement politique observées au Mali, au Burkina Faso ou au Niger, où les régimes militaires ont suspendu ou interdit des partis sous couvert de “refondation”.
Dans ces cas, il ne s’agit nullement de réformes démocratiques, mais d’un verrouillage autoritaire de l’espace public, souvent accompagné de répression des opposants et de confiscation du débat politique. Le contraste est net : là où le Bénin ou le Sénégal cherchent à structurer pour mieux débattre, les juntes cherchent à étouffer toute voix discordante.
La question n’est donc pas tant de réduire le nombre de partis que d’assainir et de structurer l’espace politique pour qu’il redevienne un lieu de débat idéologique, de projets de société clairs et de représentation citoyenne.
Le Bénin, le Sénégal et peut-être demain le Gabon, montrent qu’il est possible de concilier efficacité démocratique et pluralisme. Une voie médiane entre anarchie partisane et dérive autoritaire.
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