Le Bénin s’apprête peut-être à tourner une page majeure de son histoire institutionnelle. Si la proposition de révision constitutionnelle actuellement à l’étude était adoptée, le pays verrait naître un organe inédit : le Sénat, présenté comme garant de la stabilité politique, de la continuité de l’État et de la paix nationale.
Une chambre haute d’un genre nouveau
Selon le texte de réforme, le futur Sénat réunirait des figures de l’État et de la République : anciens présidents de la République, anciens présidents de l’Assemblée nationale, anciens présidents de la Cour constitutionnelle, ainsi que les chefs d’état-major des forces de défense et de sécurité.
Le Président de la République et le Président de l’Assemblée nationale pourraient, en outre, désigner chacun jusqu’à un tiers des membres.
Autrement dit, une institution d’expérience et de prestige, pensée comme un « Conseil des sages » à la béninoise. Mais qui y siégerait si la réforme entrait en vigueur aujourd’hui ?
Les anciens présidents de la République : les sages de l’exécutif
Parmi les anciens chefs d’État encore en vie, Nicéphore Dieudonné Soglo (93 ans) et Boni Yayi (73 ans) deviendraient, de droit, membres du Sénat.
L’actuel président Patrice Talon (67 ans) rejoindrait l’institution à la fin de son mandat.
Le général Mathieu Kérékou, disparu en 2015, ne pourrait naturellement pas y siéger, mais son empreinte symbolique planerait sur une chambre conçue pour préserver la continuité de l’État une valeur qu’il incarnait pleinement.
Ainsi, dès son installation, la chambre haute compterait deux anciens présidents actifs :
- Nicéphore Soglo
- Boni Yayi
Deux figures historiques de la démocratie béninoise réunies, cette fois, sous un même toit institutionnel.
Les anciens présidents de l’Assemblée nationale : la mémoire du Parlement
Cinq personnalités politiques sont concernées :
- Bruno Amoussou(Président de 1995 à 1999)
- Adrien Houngbédji(1999–2003 et 2015–2019)
- Antoine Idji Kolawolé(2003–2007)
- Mathurin Nago(2007–2015)
- Louis Vlavonou(depuis 2019, actuellement en fonction)
Ces vétérans du jeu parlementaire apporteraient au Sénat leur connaissance fine des institutions et des équilibres politiques.
Bruno Amoussou (né en 1939), ancien président du PSD, et Adrien Houngbédji (né en 1951), ex-leader du PRD, incarneraient les voix historiques du pluralisme béninois.
Les anciens présidents de la Cour constitutionnelle : gardiens de la légalité républicaine
Le Sénat accueillerait également les anciens présidents de la Cour constitutionnelle, véritables arbitres de la IVe République :
- Robert Dossou(2008–2013)
- Théodore Holo(2013–2018)
- Joseph Djogbénou(2018–2022)
- Dorothé Sossa(en fonction depuis 2023)
Leur présence renforcerait la dimension juridique et éthique du futur Sénat, à l’image d’une instance d’arbitrage institutionnel plus qu’un simple contre-pouvoir politique.
Les chefs d’état-major : la voix des forces armées et de la sécurité
Autre nouveauté : la participation, de droit, des chefs des forces armées et de sécurité.
Une manière d’ancrer la stabilité politique dans une logique de sécurité nationale. Les actuels responsables concernés seraient :
- Général de brigade Fructueux C. A. Gbaguidi, Chef d’état-major général
- Général de brigade Abou Issa, Armée de terre
- Colonel Codjo François Amoussou, Garde nationale
- Capitaine de vaisseau Jean Léon Olatoundji, Marine nationale
- Colonel Hermann William Avocanh, Armée de l’air
Leur rôle serait avant tout consultatif, non opérationnel un symbole fort de cohésion entre les institutions civiles et militaires.
Un “Conseil des Sages” institutionnalisé
Au total, le futur Sénat béninois pourrait rassembler une quinzaine de personnalités d’État, cumulant expérience politique, compétence juridique et autorité morale.
Inspiré des modèles africains de “Conseil des anciens”, il se distinguerait toutefois par ses prérogatives législatives réelles, lui conférant une place singulière dans l’architecture constitutionnelle
Les enjeux : un nouvel équilibre institutionnel
Le projet de création du Sénat est présenté comme un instrument destiné à renforcer la stabilité politique, à assurer la continuité de l’État et à favoriser la concertation entre les principales institutions.
Il introduirait également une nouvelle instance de représentation et de délibération au sommet de l’appareil d’État, appelée à jouer un rôle consultatif et d’accompagnement des pouvoirs établis.
Si la réforme était adoptée, le Bénin verrait ainsi naître un nouvel acteur institutionnel : une chambre haute réunissant des personnalités ayant marqué la vie politique et institutionnelle du pays depuis 1990.
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